les CD remplacés par les MP3
On a d'abord pensé que c'était un canular. Puis la rumeur est devenue information : deux majors ont décidé de ne plus envoyer de CD aux journalistes - ces disques que nous recevons avant leur commercialisation et qui nous permettent de faire notre travail de sélection. La raison? Ces CD "promo" coûteraient trop cher aux maisons de disques. Et, à l'heure de l'informatique et des supports virtuels, il serait grand temps d'utiliser les outils de la modernité : à la place, nous devrions donc recevoir des MP3.
Stupeur et tremblements! Faut-il que les patrons des majors soient coupés des réalités de la musique (et de notre métier) pour penser que les journalistes peuvent se faire un avis sérieux en écoutant quelques chansons sur un ordinateur, en format compressé, sans pochette, sans livret - un peu comme si nos amis chroniqueurs littéraires découvraient le nouveau roman de Modiano sur l'écran de leur iMac... Et puis, surtout : la musique dématérialisée, source d'immenses tourments pour l'industrie du disque, serait-elle soudainement, et très ironiquement, devenue la panacée en matière de promotion? N'est-il pas follement paradoxal de vouloir imposer le format MP3 comme mode unique de diffusion auprès des journalistes, tout en racontant dans les médias, à longueur d'année, que le plus grand péril pour la musique, c'est internet ?
Emmanuel Tellier dans la rubrique signe du temps de télérama N°2868